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Huahine… deux

C’est un samedi, en plein mois de juillet que l’ école du bateau a commencé. A la demande des enfants qui la veille m’ont pressé de commencer la classe, nous donnons nos premiers cours de français et de mathématiques, les enfants m’appellent maîtresse…

 

Huahine au bord de l’eau : on retrouve la petite place du village qui longe la baie, la buvette chez Guinette, la Halle où se sont déroulées les cérémonies funéraires de Henri Hiro et où maintenant campent les buveurs de Hinano, les pêcheurs qui ramènent leur prises, deux gros thons jaunes « balaise » commente un des pêcheurs, une dorade coryphène, un thazard, les vendeurs de fruits et légumes, le petit chemin pour aller à la plage, entravé par une vahine bien corpulente, la soixantaine, allongée sur son pareo, topless, et ficelle dans les fesses, les enfants qui jouent sur la plage, la bière dans les verres amenés sur la plage, les cerfs volants blancs qui flottent dans le ciel, le supermarché Superfare, point orgiaque de la consommation à Huahine, la douche en plein air au port, la course de vaa’a, le verre que l’on prend dans le bar qui n’est ni la casa bianca ni avec les amis…

 

Huahine-trop- de-vent, des rafales de 30 nœuds au mouillage, la frite et un saladier qui s’envolent, on a une nuit pour imaginer la chaîne de l’ancre se tordant dans le corail, ça suffit, il est 14h, on change de mouillage, direction le sud de l’île, nous longeons les montagnes de l’île, nous passons devant l’écrin vert de la plage de Ana iti, mais le fond étant jonché de corail, à 7 m, aucune bouée d’amarrage n’étant libre nous poursuivons jusqu’à la baie de Parea. 10 bateaux au mouillage, 10 mètres de fond sans connaître la nature du fond (corail, sable ?), advienne que pourra, nous jetons l’ancre, et allons nous baigner à la plage. Autour du ponton de l’hôtel, les poissons stagnent, Pierre a un lumbago qui ne veut pas passer.

 

 

De retour vers Fare, nous longeons à nouveau la plage de Ana iti, le mouillage est libre de tous bateaux, nous prenons une bouée. En annexe, nous allons au fond de la baie, nous laissons l annexe près de la maison de Terii, un vieil homme nous accueille, nous lui expliquons qu’il y a 8 ans, nous étions déjà venus dans cette partie de Huahine, et avions habité pendant deux mois la petite maison de Daniel, nous avions par la suite rendu visite à plusieurs reprises à la sœur de Pierre et à sa famille qui avait loué la maison de Daniel pendant un an ; la route a été goudronnée, Doris a quitté sa maison et ses plantations de vanille, les pit-bulls  ne sont plus là, mais les arbres, bananiers, papayers, arbres à pain, manguiers, toute une présence végétale est là c’est cette permanence végétale que nous pouvons montrer à nos enfants, avec la mer entre les deux îles Huahine iti et Huahine Nui, qui glisse un bras dans le végétal et crée le passage ; Elanore a fait ses premiers pas dans la petite maison, maintenant avec ses deux sœurs, elles courent sur la route, dans l’ombrage des arbres.

 

 

 

Sur la plage de Ana iti, Siki l’inquiétant, est toujours là, il est le gardien autoproclamé de la plage, sa pirogue un peu rafistolée est toujours là, sa petite cabane dans laquelle il expose ses colliers toujours là, et lorsque nous allons vers lui, bien sûr qu’il se souvient de moi, son obsession première étant les femmes, il nous raconte les femmes qui sont passées ici, il nous raconte celui qui est devenu aveugle, il nous raconte les tempêtes humaines de la plage…il nous ramène de la forêt trois belles papayes, puis s’en va en pirogue sur l’autre rive, récupérer de l’argent qu’on lui doit, me dit il. Un homme aborde notre bateau, il est venu en pirogue, et même muet, il arrive à se faire comprendre, il habite de l’autre côté de l’île, à Tefareri, il nous invite à venir voir sa plantation de cocotiers. Nous laissons passer l’invitation, un autre voyage nous attend, et nous remontons vers Fare.

 

C’est l’imprévu, l’inattendu, la panne, le dessalinisateur ne fonctionne plus, nous voilà contraints de revenir à Moorea, où se trouve le réparateur, Gilles évidemment nous faisons un détour par Tahiti, le temps de boire quelques coups avec nos copains de la marina, tous étonnés de nous revoir là, c’est vraiment une aubaine, et loin de nous obliger, cette escale imprévue nous ravit; nous ne faisons pas à nouveau un pot de départ, et même Arnaud part avant nous (en avion et en Norvege!), le voyage commence bien, avec ses calendriers chevauchés, ses dates bouleversées, ses allers retours, ses adieux bonjours, et avec la certitude que Tahiti ne se quitte pas, que cette île est toujours à notre portée…

Huahine, l’éternel retour!

Depuis le premiers séjours dans la cabane de la baie de Bourayne et les premiers pas d’Elanore en passant par les aventures de la famille SIAU, On ne compte plus les retours à Huahine.
Huahine, c’est notre première étape sur la route de la chine.
Quand j’ai annoncé, on part les enfants, Alice a demandé « on va où? » -« En chine! »
-« en chine? C’est vrai? » a-t-elle répondu avec les yeux grands écarquillés n’osant pas croire que le moment du départ était arrivé.
-« c’est pas une blague? On part en chine! »

 

Instant nostalgie pour les connaisseurs…

 

Départ: mardi 19/07/16 à …

Ce sont les amis qui lâchent les amarres, les parents qui coupent le cordon, le jour qui vient après la longue nuit, ils sont là les amis sur le quai, à attendre la délivrance, heureux de nous voir partir et tristes de ne nous voir partir, heureux et tristes comme nous, heureux de partir et tristes de quitter Tahiti, Tahiti s’échappe de nous à la nuit, comme une naissance l’heure du départ n’était pas prévue, il fait déjà nuit quand nous partons, Tahiti dessert son étreinte, dessert le nœud coulant, ouvre ses bras, nous laisse aller. Le quai éclairé sous une lumière jaune, les bras qui s’agitent, les formes qui se diluent, nous prenons le chenal puis la passe de Taapuna bordée des bouées vertes et rouges, cherchant l’axe médian, l’équilibre, avançant attentifs, de chaque côté le bruit de l’écume, la frange de vague dont le blanc éclate dans la nuit, c’est le couloir d’une naissance, les dernières bouées, nous sortons de la passe puis gagnons la pleine mer, nous partageons l’intimité de la nuit.

Tahiti est en feu, des feux dégringolent de ses montagnes, il y a la masse noire, le gros cône volcanique de l’île et toutes les lumières des maisons qui scintillent et Tahiti garde le feu, la lumière, le repère, nous fonçons dans la nuit, c’est ce que nous croyons, car soudain, de derrière la montagne, la lune surgit, énorme et implacable, implacable sa lumière, implacable sa force, implacable son empreinte, elle est comme un doigt pointé sur nous qui nous dit « tu dois y aller », je n’avais jamais ressenti une telle force,

des que nous nous sommes suffisamment éloignés de la passe, nous hissons la grand voile, déroulons le génois, et nous filons, un vent de 20 nœuds de travers, nous filons à 8 nœuds ; après une improvisation de pâtes à la bolognaise, les enfants trouvent leur place dans le carré, sous la table, sur les banquettes, ils s’endorment, je n’ai pas vraiment le cœur à dormir, et comme le réseau téléphonique passe, j’envoie des sms, je reçois des retours bienveillants « bon vent » «  bon voyage »… « tu ferais mieux d’assurer la veille plutôt que d’envoyer des sms Lol »…le vent a maintenant un peu faibli, 17 noeuds grand largue, le bateau glisse, avec une telle aisance, une telle facilité, tout devient tellement facile, évident, il suffit de sentir le vent gonfler les voiles, d’entendre la coque frotter la mer, de sentir cette poussée extraordinaire du vent,

nous renaissons à la nuit, au vent, au bateau qui court dans les vagues, au long sillage. Nous n’avons plus d’identité que celle du sillage, nous n’avons qu’une identité celle du vent, qu’un cœur de nostalgie lourd des départs, un cœur frissonnant des arrivés,

nous étions tellement occupés par tous les préparatifs du départ et maintenant tout est clair, facile, le bateau qui trace dans le vent, le vent qui souffle, la mer fendue par l’étrave, dans le ciel, le sillage parallèle laissé par la lumière de la lune.

Tahiti s’efface, diminue, ses lumières ne sont plus que traces dans la nuit, je me retourne encore, et elle n’est plus là.

Le froid, la fatigue, à minuit, je m’endors tout habillée, polaire, veste de quart, pantalon et chaussures, Pierre assure le relais de la veille et à trois heures, quand il me réveille pour aller dormir, j’ai vraiment encore envie de dormir, tous les quart d’heure, je fais un tour d’horizon, nuit, vent, lune, pas de bateau à l’horizon, pas de changement dans l’allure, la trace du bateau sur l’écran s’allonge et suit la route indiquée, en fin de quart, je surveille les feux tricolores d’un bateau à l’horizon, rouge sur vert, mais il est si loin, 6 heures, le jour s’est levé, un petit jour faible et geignard et moi je vais me coucher, aucune île en vue encore, pourtant si proche sur la carte, Pierre se réveille, quand il est 9 heures, je me lève d’un coup et sors du cockpit pour voir l’île « elle est où ? » comme une évidence, elle est là, avec ses reliefs propres à elle, ni Tahiti, ni Moorea, qu’on avait l’habitude d’observer, l’ile de Huahine apparaît, toute déglinguée, toute accidentée, avec ses pics et ses montagnes, toute proche aussi, mais il nous faut encore une bonne heure pour la contourner et arriver à la passe, un quinzaine de bateaux sont déjà au mouillage, vingt , vingt cinq en fait après décompte, nous cherchons, nous tournons à plusieurs reprises pour trouver une place au mouillage, c’est finalement près de la montagne en forme de femme enceinte couchée que nous jetons l’ancre, la tête renversée, le ventre proéminent, les seins qui pointent vers le ciel, il paraît qu’elle est en train de donner la vie, et nous, nous renaissons au voyage.

 

 

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